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Dominique Lin

Dominique Lin

Écrivain - chroniqueur - Ateliers d'écriture


Le Goût du large, Nicolas Delessale, chez Préludes

Publié par éditions Elan sud sur 1 Janvier 2016, 09:00am

Catégories : #Chroniques livres

Le goût du large commence par une promesse : le voyage. Nicolas Delessale nous y emmène, mais ce n’est pas celui qu’on attend : c’est celui d’une écriture ciselée de personnages (1) et de situations esquissés au couteau, dessinant une palette humaine très riche et très forte.

Tout commence à l’embarquement à bord du MSC Cordoba, un porte-conteneurs et ses 1269 boîtes embarquées de toutes les couleurs. Leur contenu, personne à bord ne le connaît, et ce n’est pas le sujet. L’équipage est hétéroclite, fait d’hommes de nationalité, mais surtout de caractères différents. Chacun possède son histoire, son port d’attache émotionnel, ses espoirs à court ou long terme. Chacun tient sa place, indispensable sur ce géant flottant et le personnage central va les côtoyer de près ou de loin — malgré la promiscuité —, il ne fera que croiser certains durant ces neufs jours de voyage en mer pendant lequel, chaque soir, au coucher du soleil, il va guetter le rayon vert.

Mais nous allons très vite quitter ce navire pour aller rejoindre les souvenirs de l’auteur, reporter de guerre. Il va nous balader aux quatre coins des conflits de la planète, champs de bataille ou de révolution. Situations difficiles, voire horribles, accompagnées chaque fois d’un trait d’humour, peut-être pour ne pas sombrer, pour survivre et continuer, pour retourner là où les gens se battent, meurent, résistent. Les souvenirs défilent, il y revient parfois, au fil des jours qui passent à toute allure, jusqu’à destination.

Alors, si l’écriture de Nicolas Delesalle m’a conquis — et les citations pourraient être nombreuses —, c’est le sens du roman qui m’a peut-être échappé. Au fil des chapitres et des situations qu’il a traversées, ce qui était attirant au départ a fini par me lasser un peu. Des personnes à qui je m’attachais, je n’avais pas le temps de les connaître, à peine le temps de les aimer. Peut-être comme l’auteur lors de ses nombreux périples, je l’admets, mais une poignée de pages pour une brève histoire, puis une autre, et une autre encore. À regarder trop de feux d’artifice, on finit par préférer la flamme sereine de la bougie. J’ai perdu le sens de la traversée en mer qui passe au second plan. Pourquoi avoir mis en scène ce voyage si c’est pour le quitter sans arrêt ? Tous ces bruits de canon, tous ces cris, Delessale avait certainement besoin de les excréter. Prétexte, certes, mais il me manque la profondeur du voyage en solitaire sur ce géant de métal, ce pèlerinage marin qui fait évoluer l’âme de celui qui vit en silence face à l’immensité. L’homme est certainement marqué, on le serait à moins, mais pas un jour de répit, pas de souvenir réellement serein… une focale unique, pas de contrepoids.

Un auteur que j’aimerais rencontrer pour lui poser ces quelques questions, mais surtout le remercier de ce moment de lecture intense.

 

1) « Le soir de notre rencontre, il jouait avec un autre client, un vieux Russe buriné taillé dans un bloc de granit et dont aucun sculpteur n’avait songé à finir le visage. Physiquement, c’était une ébauche… »

 

Résumé de l’éditeur :

« Le temps : tout était là, dans ces cinq lettres, cette simple syllabe. J’allais soudain en être riche, ne plus courir après, le nez rivé sur l’ordinateur, le téléphone. Pendant neuf jours, j’allais devenir un milliardaire du temps, plonger mes mains dans des coffres bourrés de secondes, me parer de bijoux ciselés dans des minutes pures, vierges de tout objectif, de toute attente, de toute angoisse. J’allais me gaver d’heures vides, creuses, la grande bouffe, la vacance, entre ciel et mer. »

De l’inaccessible Tombouctou à la mélancolique Tallinn, entre une partie d’échecs fatale quelque part dans un hôtel russe et un barbecue incongru à Kaboul, des clameurs de la place Tahrir au fond d’un trou, dans l’Aveyron... C’est le roman d’une vie et de notre monde que raconte Nicolas Delesalle, le temps d’une croisière en cargo.

Après le formidable succès d’Un parfum d’herbe coupée - finaliste du prix Relay des voyageurs 2015 -, Le Goût du large embarque le lecteur pour un voyage passionnant, plein d’humour et d’esprit, de couleurs et de saveurs, et réveille notre irrésistible envie d’ailleurs.


 

Le goût du large, Nicolas Delesalle
ISBN : 225310776X
Éditeur : Préludes (janvier 2016)

 

 

Le Goût du large, Nicolas Delessale, chez Préludes
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