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Dominique Lin

Dominique Lin

Écrivain - chroniqueur - Ateliers d'écriture


La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?

Publié par Dominique Lin sur 14 Avril 2019, 16:11pm

Catégories : #atelier d'écriture

Notre langue, celle de Molière, de Baudelaire, de Giono ou Hugo, est souvent chahutée, distordue. Certains veulent la réformer quand d’autres la voudraient immobile, elle, si vivante, musicale, virevoltante. Doit-on la figer dans une éternité obscure ou l’aider à nous accompagner dans notre évolution comme elle l’a toujours fait tout en respectant ses racines ?
Chaque jour, de grands discoureurs, des spécialistes et autres assidus de l’oral l’utilisent en public avec maladresse, voire ignorance. Quand ce n’est pas la redondance, ce sont des contraires qui s’invitent dans une même phrase, même si à la première écoute, elle semble bien sonner… Les mots sont utilisés à contresens malgré les flèches directionnelles de nos dictionnaires, sans oublier les anglicismes si chers aux personnes en quête d’une modernité illusoire. Il n’est pas un sport nouveau qui ne soit affublé d’un nom anglais, même si ce dernier naît en France, et les conversations au sein d’une entreprise qui se veut dynamique se doivent d’être punchy ou peppy et posséder au minimum un mot sur deux en anglais, sans compter les acronymes. À un brainstorming, j’ai toujours préféré un lâcher d’idée !


Ce discours pourrait paraître rétrograde, détrompez-vous.
Il est des signes révélateurs qui sonnent comme une alarme.
Chaque année, depuis 5 ans, j’anime des ateliers d’écriture avec des élèves de CM2, cette classe charnière dans l’apprentissage de la langue, puisqu’elle est la dernière étape de l’acquisition du socle. Dernières dictées, dernières règles de grammaire, de conjugaison ou de syntaxe.
Chaque année, mon rôle, en deux heures, n’est pas de faire rattraper un retard accumulé, mais d’inciter les enfants à débrider leur imaginaire, à leur ouvrir une fenêtre pour qu’ils lâchent leurs idées, amorcer le canal qui va de l’esprit à la main qui écrit. C’est toujours un moment intense, rempli de surprises, voire d’émerveillement, mais, car le mais est là, un mais qui concerne la langue, notre langue.
Les mots ont perdu toute forme, toute étymologie, toute nuance. Le temps se perd à l’infini, et la nuance disparaît dans un brouillard sémantique. Nous sommes dans le sujet, verbe et complément. Adieu la métaphore, l’allégorie, ou même le sens poétique. Il ne reste que le squelette d’une langue dont les mots sont accolés, réduits à leur plus stricte phonétique.

« Il aitais une fois une fille qui tombi d'un escalier » ou « J'ador aidait le monde »
J’ai peur !
Oui, j’ai peur, car au-delà du puritanisme académique, réside la notion de l’esprit, de la réflexion, du recul sur les idées que l’on exprime, de nuance du ressenti, de vécu, du message à l’autre dans un monde tout aussi nuancé, coloré, contrasté, complexe.

D’où cela vient-il ? Certains accusent les différentes méthodes d’apprentissage du français, cent fois remaniées, contredites, stoppées en vol, détournées… Mais il est aussi question de transmission. Que peut transmettre à ses enfants un adulte qui ne connaît pas sa langue ? Un choix binaire, bien-mal, noir-blanc, j’aime-j’aime pas (je n’aime pas, désolé), cool-pas cool, je kiffe… ou pas.
Alors, quand je lis ces textes d’enfants à l’imaginaire débordant, je reprends un peu confiance. Ce lien à l'existence est toujours vivant, vivace, coriace, inusable, rebelle, résilient, résistant, robuste, tenace. Mais il lui manque la transcription, l'expression, l’écriture, ce miroir qui permet de comprendre et d’éviter d’être aspiré dans le trou noir de l’ignorance.

Pour vous faire votre propre idée, je vous invite à tenter de lire, a minima de déchiffrer, les textes photographiés ci-dessous, puis de laisser votre commentaire…
Le sujet de l'atelier, puisque nous étions en période de centenaire de l'Armistice, était : « Nous sommes en pleine guerre et vous êtes un super héros. Avec vos super-pouvoirs, vous allez arrêter la guerre… »

La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
La langue française s’approche-t-elle du trou noir ?
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